Publié dans ANECDOTE, souvenir, Voyage

Fidèle

Je suis sur la magnifique plage de Varadero avec mon p’tit bonheur, celui de Félix Leclerc. L’océan devant moi est comme une carte postale, le ciel est d’un bleu parfait, les palapas sont de l’or pour le touriste, le sable fin de la plage me rappelle que le bonheur est fait de petites choses et aujourd’hui, il est sous forme de grain de sable. Chaque fois que je suis devant la mer, je suis rempli d’humilité. Humble devant l’immensité. L’océan c’est la plus belle chose qui existe. L’océan est arrivé avant l’évolution.

Je suis là en silence quand tout à coup, j’entends un chien hurler…
Voici l’histoire de Fidèle un « wild dog ».
Elle se promène sur la plage de Varadero. En fait la plage lui appartient. Elle vit là, c’est sa demeure. Le ciel plein d’étoiles est ça veilleuse de nuit pour les soir difficile. Elle tourne autour du resort Playa de Oro et les gens de l’hôtel l’acceptent. Par un bel après-midi, elle me jappait après. J’ai été vers elle sans aucune hésitation.
 
Elle est pleine de gales sur ses pattes gauches, des plaies ouvertes. La vie sur le bord de l’océan n’est pas chose facile. Je la baptise Fidèle en hommage à Castro.
Elle s’assoit et me laisse la flatter. Je marche vers le resort et nos chemins se séparent car elle va à l’ombre sous la galerie de la boutique de cossins. Je comprends que c’est sa demeure.
Le même soir au buffet, je remplis une assiette de carton pleine de bon poulet grillé avec un bol d’eau.
 
Avec mes enfants et les enfants de gens rencontrés au resort, je vais nourrir mon amie.
Je l’appelle près de la galerie de cossins et soudain sous la lueur du soir, apparaît comme un cadeau mal enveloppé Fidèle. Elle mange le poulet et boit l’eau voracement pendant que je la flatte doucement. Une fois qu’elle a mangé et bu, elle se déplace sous la galerie et ressort immédiatement avec 5 magnifiques petit wilds dogs et vient les porter à mes pieds. Un grand honneur pour moi.
Elle est maman. Les chiots ont deux semaines pas plus. Je suis admiratif et triste aussi. J’aurais le goût d’amener Fidèle avec moi. Je prends l’un de ses chiens dans mes mains. Fidèle se colle sur moi avec amour. Je dépose le chiot après lui avoir donné une bonne dose de câlins.
 
Je repars vers le buffet avec la marmaille. Fidèle ramène ses chiots sous la galerie.
Et tous les soirs pendant mon voyage, j’ai nourri Fidèle pour qu’elle puisse bien allaiter ses chiots.
Un soir, je suis au bar du lobby à prendre quelques bières avec Jorge Cueto, un dude de Toronto, MC une fille de cross fit de Brossard avec le dos large de même, Miguel du Panama (il parle français), Lopez du Nicaragua quand soudain, on entend un chien hurler à l’entrée. Je vais voir! C’est Fidèle qui branle la queue.
 
Mon serveur de 6’7” qu’on surnommait « poquito » (qui veut dire petit) me dit, ébahi, que c’est la première fois en trois ans qu’elle vient si proche et que jamais elle se fait aller la queue de bonheur. Il me regarde et dit:

–  Tu es étrange Lager Man. Tu as hypnotisé Jorge Cueto et le chien du resort qu’il dit en riant! Ton coeur est bon Lager Man.

Et il me donne une claque sur l’épaule. Au moment d’écrire ces mots, j’ai encore mal à l’épaule gauche. Sa main de gros Cubain noir foncé résonne encore dans mon squelette.

– Je peux l’amener au bar?

Le serveur sans hésiter:

Si Lager Man.

Nous avons bu longtemps et Fidèle est restée à mes pieds couchée tout le long. Nous avons bu, nourri Fidèle, nous avons ri, abreuvé Fidèle car le bar ne ferme jamais et le buffet du soir non plus. Viva Cuba! Viva la Raza. Nous avons ce soir imposé notre présence à la nuit.
Vers trois heures du matin, j’ai été reconduire mon amie Fidèle vers son dessous de galerie à côté de la plage.
 
Depuis mon retour parfois la nuit, je me réveille en sursaut et j’ai l’impression d’entendre un « wild dog  » hurler à la lune des loups!

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Publié dans ANECDOTE, Lachute, LUTTE, souvenir

C’était l’été des possibles

À l’été 1984, j’étais le roi du BMX. J’étais en train de créer ma propre légende à coups de pédale, du moins, cest ce que je pensais dans ma tête! En plus, j’étais un genre de grand champion du lancer de la balle de tennis sur un mur de ciment! Jai mille fois remporté la série mondiale du ptit Canada. Comble du ptit gars occupé dans son été trop court, j’étais aussi patrouilleur officiel de mon quartier, avec mon sous-chef en chef, le petit Marco! Nous avions même des badges de shérif achetés au Rossy deux étages de la grande rue. Au coin de la rue, nous étions les boss des quatre coins! 
Moi, du haut de mes 11 ans, et mon frère, du haut de ses 8 ans, on avait la vie devant nous et, surtout, lespoir du meilleur à venir! 
 
J’étais le propriétaire dun splendide BMX de marque Cobra, offert par mon parrain! Oui, oui, le fameux Cobra, celui avec des roues rouges, le siège rouge, les poignées du guidon rouges, la styromousse en avant de la barre rouge et les poignées des brakes rouges. À ce jour, ce bicycle est le plus beau cadeau que jai reçu. Jai usé ce Cobra jusqu’à la moelle du métal, jusqu’à ce que la rouille soit sa couleur permanente! Mon frère, lui, la journée que jai reçu mon Cobra, a pleuré toutes les larmes de son corps de ptit gros de 8 ans. Il est allé se promener avec son bicycle au « tire«  balloune, avec un siège banane et des poignées Mustang! Nous étions pauvres, très pauvres, et de recevoir ce bicycle, c’était comme si j’étais lautre bord de la ligne à Disneyworld, et que mon ptit frère que jaime plus que la vie elle-même était du mauvais bord de la ligne, à me regarder faire les manèges. Même si on se battait souvent, même si on se tapait sur la yeule à tous les jours, jai fini par partager mon Walt Disney avec mon ptit frère, ma seule vraie famille. 
 
Mon frère reçoit son bicycle aussi! Voyant mon frère malheureux comme les pierres, malheureux comme jai rarement vu, ma mère avait cassé tous les cochons de la maison et même les cochons de lune de ses sœurs! Je revois encore ma mère arriver à pied à la maison avec le fameux bicycle. Je revois la face de mon frère et la mienne 
Mon frère a dans ses mains un RMX! Oui, oui, un RMX, pas un BMX, mais bien un simili-bicycle deux fois plus pesant que lui! Le sourire de ma mère valait un milliard, que dis-je, tous les milliards que peut posséder Bill Gates! Comme nous sommes des enfants venant dun milieu ultra pauvre, nous avons souri et donné plein de becs à maman, qui ne connaît rien aux BMX! Marco a apprivoisé la bête et, avec le temps, a aimé son RMX gris charbon! Par la suite, nous sommes allés à la recherche du plus gros  »jump » jamais réussi dans lhistoire des « jumps« . Ce fut notre quête du Saint Graal pour quelques années, jusqu’à la découverte de ces extraterrestres qu’étaient les filles! 
 
Le RMX était le reflet de la famille Beauséjour vivant sur la rue Filion. Il était le symbole de notre vie, de la contrefaçon. Trop pauvres pour avoir du linge de marque, on se promenait en jogging Converted pendant que les autres ptits morveux du coin se promenaient en Converse! Nous avions des t-shirts Vuarnet avec le logo imprimé tout croche, car achetés à lencan de Lachute, pendant que les ptits banlieusards se promenaient avec des Vuarnet avec un petit « r«  à coté du logo! À cette époque, jaurais vendu ma mère pour avoir un vrai Vuarnet. 
 
C’était leuphorie dans les rues de Lachute. C’était soir de tombola dans le comté dArgenteuil avec, comme point culminant, la soirée de lutte dans le vieil aréna! Oui, oui, les vraies étoiles de la lutte étaient chez nous, celles de la lutte internationale. Nous attendions avec impatience les Dino Bravo, Gino Brito, Édouard Carpentier, Steve Strong, Superstars, King Tonga, Gilles « The Fish » Poisson, Tarzan « La Bottine » Tyler, Les Rougeau, Les Garvin, le gros Mad Dog Lefebvre qui est mort 6 mois plus tard dans un accident dauto à Chicoutimi à l’âge de 30 ans et linimitable Abdullah « The Butcher« . « The Butcher » était mon idole. Pendant que tout le monde le détestait, moi je ladorais, car j’étais tanné de le voir perdre contre le presque parfait Rick Martel. Même à cet âge, je naimais pas les athlètes parfaits, jaimais ceux qui tombaient pour mieux se relever. 
 
 
Nous sommes en file pour entrer dans laréna et déjà je tremble dans mes culottes courtes de ptit gars de 11 ans. Ce soir-là, javais deux objectifs soit rencontrer M. Carpentier et Abdullah « The Butcher« . Javais un sourire daccroché dans la face qui ne voulait pas décrocher! Ce soir-là, jai probablement été la personne la plus heureuse à lest de lAtlantique![Saut de retour à la ligne]Ce soir-là, je suis avec mon oncle Paul-André. Cest grâce à lui si nous sommes ici. Il y a mon cousin Pierre-Paul, mon frère et toute la ville de Lachute. La vieille grange est remplie jusquau bouchon! Les vieux se sont gardé les places debout, et nous, nous sommes sur le bord de la baie vitrée! Lambiance est carnavalesque, il ne manque que la femme à barbe et lhomme tronc pour compléter ce joyeux cirque. Je suis assis comme un enfant sage sur le banc et je porte fièrement mon Vuarnet au logo croche! Jai la bouche gommée de barbe à papa et mon frère aussi, car on se bat contre la même barbe à papa. Nous avons les doigts gommés et nous sommes heureux. Deux ptits crottés contents de vivre. Des fois, pas souvent, il y a des journées quon voudrait éternellesMoi et mon ptit frère tout gommés, ça fait partie de mon éternité! 
 
Noirceur, silence, boucane et entrée des « Head Hunters » avec leur gérant, contre qui, je me souviens pus! Je me souviens juste de leurs torches de feu dans le noir. Magie dans les yeux dun ptit cul de Lachute! La soirée défile à un train denfer. Je réussis à parler à M. Édouard Carpentier. Un en deux pour le roi du BMX, il ne reste qu’à rencontrer Abdullah. 
 
Quart de final de la soirée, Abdullah contre le pauvre « Kojak » Shelley! Le combat dure le temps de trois gorgées de notre slush Puppies. The Butcher a matraqué Kojak à coups de chaise pendant que larbitre avait le dos tourné. J’étais le seul dans laréna à applaudir Abdullah, qui ma envoyé un signe du pouce, voyant que j’étais le seul debout pour lencourager à estropier son adversaire! Mon lutteur, mon mien, a gagné! Je suis presque comblé de bonheur!
 
Entre la finale et la demi-finale, je vois le gros Abdullah assis dans un coin de laréna, et personne ne va le voir bien sûr! Mon frère reste assis avec mon oncle et mon cousin, et moi je cours littéralement vers « The Butcher« ! Je cours comme Forrest Gump, je cours comme Ben Johnson, comme Usain Bolt, mais je ne suis pas un olympien et je plante la face la première! La gueule en sang sur le béton. Ça pisse le sang comme quand on égorge un cochon! Je messuies avec ma manche de Vuarnetbof, que je me dis, cest juste un maudit faux Vuarnet, et je reprends ma course vers mon idole! 
 
Le roi du BMX vs Abdullah « The Butcher« 
Nous sommes face à face. Je me sens tout seul dans mes culottes. Je me demande ce que je fais là! Je le trouve encore plus laid à 6 pouces de ma face. Je lui donne mon stylo et ma feuille. Aucun son ne sort de ma bouche, moi qui suis un verbomoteur! Je tremble et tremble encore! Et quand jai eu fini de trembler, jai recommencé. Il ne parle pas plus que moi.
 
Il met ma feuille dans sa bouche et la mâche comme de la gomme balloune! Il la mâche sans aucune réaction dans sa grosse face de méchant. Il avale la feuille et a un ptit sourire en coin. À ce moment précis, javais le goût de faire un dégât dans mes culottes. Il met le stylo dans sa bouche et le mâche aussi. Il crache le stylo et sa langue est bleue. Il se lève et quitte. Jai le goût de pleurer. À quoi je devais mattendre, cest quand même le plus méchant des méchants. 
Je reviens massoir en pleurant. 
 
 Moi: Jai pas de signature! 
 
Et je chigne 
 
 Mon Oncle: Pourquoi tu pleures Pat? Tu las eu ta signature! Tu vas ten souvenir toute ta vie! Butcher est pas fou, il sest permis de faire ça avec toi, car il a ben vu que tu étais vraiment un de ses fans! Il a joué son rôle juste pour toi à la perfection! 
 
Le soir même, mon oncle a pris une bière avec Abdullah à la brasserie, et mon oncle lui a parlé de moi. Abdullah lui a demandé sil en avait trop mis et espérait que son fan numéro un à Lachute ne soit pas trop déçu! Mon oncle de lui dire que javais été ben impressionné, et que dans les estrades, le monde riait de me voir faire les gros yeux! Trente-trois ans plus tard, je me souviens encore de cette rencontre, ettrente-trois ans plus tard, je suis toujours le plus grand fan dAbdullah « The Butcher« . Merci encore pour lautographe! 

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Publié dans ANECDOTE, BASEBALL, Voyage

Heureux qui comme Robbie

Robbie aime le silence, la Michelob Ultra, les Phillies, sa femme Marlyne, Hank Williams et le silence.

Robbie a 60 ans cette année, il compte les dodos qui lui restent avant la retraite. Il était mon voisin de chambre de motel à Wildwood lors de notre semaine de vacances en famille. À chaque matin, nous nous retrouvions au  Coffee Shop. Moi j’allais chercher du café pour moi et ma blonde et lui de même.
Robbie: Good morning Pat!
Patrick: Good morning Sir!
Robbie: Life is good with you?
Patrick: Yep! What about you old man?
Robbie: Nice and easy.
C’était notre conversation vers 8:30 en avant-midi chaque matin! Après, Robbie allait s’enfermait dans son silence.
L’après-midi, il écoutait ses Phillies sur une petite radio transistor avec sa femme. Un après-midi,  je me suis assis avec lui pour écouter ses Phillies contre les Mets. Nous avons échangé quelques silences durant la partie. À la 7e manche, le gros Duda des Mets a assommé les Phillies et Robbie avec un circuit.
Robbie: Fuck! Fuck! Fuck! Damn Phillies! Enough!
Il ferma la radio d’un coup sec. Puis il s’ensuivit un long silence. Pendant ce temps là Marlyne fumait une ixième Marlboro en jouant au poker sur son iPad!
Moi: Hey Robbie, si tu avais la chance, avec qui tu aimerais lancer la balle chez les Phillies?
Robbie: …
Moi: Tu as le droit de choisir dans les joueurs du passé aussi! Pis tu peux pas prendre Mike Schmidt, c’est un 3e but…
Robbie: Aucun. Je choisirais de lancer avec mon père. J’ai pas assez lancé avec mon père.
Marlyne a arrêté de fixer son iPad. Le silence envahit soudainement le nord de Wildwood et embaume le ciel au-dessus de nos têtes. Le silence s’est étendu jusqu’en Pennsylvanie et peut-être même dans tout l’état du Maryland. Robbie a les yeux plein d’eau et prend une bonne gorgée de Michelob Ultra! Notre malaise mutuel était à couper au couteau!
Robbie: Mon père adorait les Phillies. J’ai été voir deux games avec lui avant qu’il meurt, j’avais 6 ans. Je m’en souviens comme si c’était hier. Mon père est mort au Vietnam. La vie est fragile Pat! Life is a bitch! J’ai jamais oublié, jamais.
Moi: Désolé pour la question!
Robbie: Désolé pour la réponse.
Qu’il dit en riant. Nous rions à gorge déployée pour ne pas pleurer, j’imagine. Nos rires sont aussi jaunes que le soleil de Wildwood et aussi faux que les seins de mon autre voisine de palier et ce n’est pas peu dire.
Nos chemins ont continué de se croiser le matin au Coffee Shop! Et pour une dernière fois le matin de mon départ…
Robbie: Hey Pat! Bonne route! J’voulais te dire, je t’ai regardé toute la semaine agir avec tes deux enfants pis tu es un fucking good father, fucking good. Damn good. OK? 

Dit-il en mettant son gros doigt d’électricien dans le creux  de mon épaule.
Moi: Quand je vais retourner chez-nous pis que je vais lancer la balle avec mes enfants, je vais avoir une pensée pour toi old man! Thanks Robbie.

Et à mon tour, j’écrase mon petit doigt de presque fée dans son épaule de vieux électricien.
Robbie: Mon autre choix ç’aurait été de lancer avec toi, Pat!
Nous nous sommes regardés. Nous avons couru comme des enfants dans nos chars respectifs et sorti nos mites pour se lancer quelques hardballs au beau milieu de la Ocean Avenue comme deux enfants de 6 ans. Et tout ça 10 minutes avant notre départ.
Le ciel de North Wildwood était d’un bleu carte postale, il faisait contraste avec le bonheur d’un partisan des Phillies et des Expos.
Nice and easy old man!

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