Publié dans NOUVELLE LITTÉRAIRE

 » Chainsaw Pilon »

*Cette semaine je t’offre un texte de mon livre

Je n’ai pas connu « Chainsaw » Pilon! J’ai eu l’histoire de cet homme fort à travers les vieux du P’tit Canada, les rumeurs et les échos de fin de soirée.

«Chainsaw» est né d’un one night stand! Pour ceux qui se demandaient dans le quartier, non, il ne vient pas de la cuisse de Jupiter. On n’accouche pas de “chainsaw”, on le chie avec résignation.

Lui, il était à 1 cm de ne jamais voir le jour. Je parle ‘’icitte’’ de la distance qui sépare le vagin de l’anus de sa mère biologique! Il aurait été conçu dans une carrière de sable un soir où la lune était pleine.

Il est né dans une crèche comme le petit Jésus. Et heureusement pour lui, il a été adopté par une sainte femme, la mère Pilon! Une femme qui pouvait accueillir mille et un enfants dans ses deux gras de bras!

Pilon mesurait 6’6” et pesait 350 lb à la fin de sa croissance, mais sa boîte à poux elle n’a connu que très peu de changements! Un homme gargantuesque, d’une force surnaturelle avec le cerveau d’un enfant résume assez bien notre sbire. Un cœur tellement gros qu’il aurait pu être considéré comme une des huit merveilles du monde!

Il a eu son surnom à force de toujours faire un bruit de chainsaw avec sa bouche, faisant même le geste imaginaire de la crinquer en vous saluant!

Il ne manquait jamais un épisode des 100 tours de Centour à Radio-Canada et espérait secrètement avoir une montre magique comme dans l’émission, même rendue à 20 ans! Il aurait vendu son âme à Centour et Yves Massicotte pour juste toucher cette montre! Pis dire qu’on pense que la Apple Watch de Steve Job est une révolution.

Il pêchait des milliers de grenouilles dans la rivière du Nord, qu’il allait revendre au Chinois du fameux Lily Garden sur la rue Principale! Il ne vendait que des cuisses bien sûr! La rumeur a longtemps couru comme une légende urbaine de petite ville que ‘’chainsaw’’ pilon vendait aussi des chats errants au Chinois, mais là je n’oserais perpétuer ce mythe, mais je me suis toujours demandé si ledit chat finissait en général Tao ou en spare ribs?

Chainsaw pilon aimait aussi le grand orange Rusty Staub et l’autre grand orange des Expos, youppi! Je ne suis pas sûr que dans sa tête de perruche, il faisait la différence entre les deux! Il avait toujours une casquette trois couleurs des Expos sur la tête et sa mère avait fait installer une hélice sur le top de sa capine! Il était beau notre sbire.

À tous les matins, du début septembre à la fin du mois de juin, « Chainsaw » s’en allait avec sa corde à danser jouer avec les jeunes filles du Laurentien school pas loin de chez eux! Il connaissait par cœur toutes les chansons de corde à danser possibles et impossibles! Après, sur l’heure du midi, il allait manger du réchauffé de sa mère!

La mère Pilon ma dit qu’elle avait ramassé chainsaw à la crèche comme on ramasse une cochonnerie à terre! Mais comme dans les contes de fées, comme dans les plus beaux contes de princesses, comme une histoire écrite par les productions Disney, la mère Pilon est arrivée dans sa vie. Dieu merci pour tous ces enfants abandonnés, car la chose la plus facile à faire dans ce bas monde c’est d’fourrer à plein cul tout en se crissant du reste!

Y avait au boutte de la rue Baron « Balloune » Champlain, un garagiste de la chose mécanique! Un artiste du « crankshaft ». Le monde rentrait chez Balloune comme on entre dans un dépanneur ouvert 24h. Tellement qu’il avait fait installer des portes tournantes comme chez Eaton! Il y avait toujours un mangeux de chips pour venir sentir ce que Balloune faisait! Les senteux dans le village qui venaient voir la catastrophe! 

Ce soir-là, Balloune était à changer l’huile du Datsun de Raymond Laplante, mais il faut dire ‘’Remond’’! ‘’Remond’’ aimait son Datsun plus que ses enfants, plus que sa femme! Le Datsun prenait l’huile finalement! Remond était dans tous ses états! Un état proche du Wyoming…

Il chialait après Balloune comme si c’était de sa faute, comme s’il avait fait exprès! Lapalnte sacrait et pour fins historiques a nommé tous les saints du ciel cette journée-là! Il criait fort! Certains disent qu’il aurait été entendu jusqu’aux limites de la rue principale et l’écho se serait fait entendre jusqu’aux limites de la rue Béthanie. Balloune aurait voulu sortir du dessous du char trop vite tanné d’entendre Remond sacré, mais y aurait accroché le « jack » pis le Datsun serait tombé sur ses jambes.

La pression du Datsun aurait fait éclater l’une de ses jambes en mille morceaux. Une scène d’horreur dans le réel ce n’est pas comme dans un film de Stephen King ou un livre de Patrick sénéchal c’est 1000 fois pire. Il y avait du sang partout dans le beau garage. Le genre de plancher que tu pouvais manger dessus. Étrangement, il y a eu comme un grand silence par la suite. Remond ne criait pas d’être fâché, mais s’est mis à crier de peur, d’horreur!

Raymond Laplante: « BALLOUNE! BALLOUNE! »

On pouvait entendre crépiter les vieux néons au-dessus de leurs têtes! Même les filles toutes nues sur son calendrier dans le fond du garage étaient traumatisées! Remond était seul au monde avec la carcasse de Balloune agonisant! Il a bien essayé de soulever son maudit Datsun, mais rien à faire, il n’a pas bougé d’un pouce, même pas un pouce fort.

Pis là celui qui était un homme fort sans le savoir est passé devant le garage… notre chainsaw nationale! Il est passé devant le garage avec sa belle « capine » à hélice des Expos! Il n’a fait ni une ni deux et il est rentré des portes tournantes! Il a poussé Remond du chemin…

La scène est digne des plus grandes vues d’Hollywood! Un classique du genre! chainsaw Pilon n’a rien à envier à Louis Cyr, Jos Montferrand. Je le jure devant mes frères et sœurs du p’tit Canada, car on est toute de la famille dans notre quartier! Pilon a pogné le devant de la Datsun à bras le corps et a levé jusqu’au bout de ses épaules la Datsun en criant à Raymond:

« Enlève M. Balloune! Enlève M. Balloune! »

La scène était d’une poésie sans nom, d’une beauté ridicule! chainsaw qui a le char au bout de lui-même, Remond qui tient Balloune dans ses bras et un silence total! Le genre de silence qui vous reste entre les deux oreilles pour le reste de votre vie. Un silence qui transperce à même votre âme! Un silence qui traverse le temps pour se rendre jusqu’à ce texte!

Pour fins historiques, Chainsaw Pilon n’a pas de statue à son effigie dans le p’tit Canada, mais la statue est dans le cœur de chaque personne qui a lu cette belle histoire.

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Barbu de ville raconte #8

Cette semaine je te raconte mon aventure au resto l’Escudo, petit trésor Portuguais.

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Les beignes de Mado

Un petit bout de femme de presque rien roule de la farine avec une bouteille de Liqueur en vitre en guise de rouleau à pâte. Il y a plein de farine sur la table, à terre, sur son tablier et si je suis tranquille tantôt je vais pouvoir manger de la pâte à beigne cru.

Nous sommes en 1981 au bout de la rue Filion au cœur même du petit Canada. J’ai 7 ans et je suis en 1re année à l’école St-Alexandre.

Les samedis d’hiver dans mon coin de misère étaient magiques. Il me réconcilie avec mes souvenirs d’enfance. Ces samedis d’hiver ont l’odeur de beignes aux patates de ma vieille mère Mado.

L’étoile de Guy Lafleur commençait à pâlir comme celle du Canadien en général. Par contre celle des Expos était bien en vue dans le firmament de nos soirées d’été.

En 1980, les samedis commençaient de bonne heure comme le disait ce grand philosophe de l’ère moderne Claude « Piton » Ruel, l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt pour le « warm-up »! Vers 6h dans le petit matin, nous étions déjà à glisser sur la côte en avant de la maison. La cagoule, la crémone, les mitaines conçues pour prendre l’eau, les bottes Sorel, les salopettes toujours trop grandes ou trop serrées, le manteau trop chaud ou pas assez pis toujours un peu de morve sur le bord du nez c’est comme qui dirait un prérequis.

Par la suite si nous étions assez de monde on jouait au hockey et en ce temps-là tout le monde voulait être Bossy, Tonelli ou Bryan Trottier. C’était la dynastie des Islanders de New York, ma mère préférait Dynastie avec le beau Blake à Télé-Métropole.

Dans les hivers de mon enfance, c’est comme si le p’tit Canada était emmitouflé dans une boule de Noël qu’il faut brasser. Mon quartier féérique, mais avec des bouteilles vides et parfois les pleures des mères monoparentales en symbiose avec la musique des beaux dimanches à Radio-Canada. Arrive l’heure (J) dans mes samedis d’hiver! Il était 16h partout dans le comté d’Argenteuil, les rues et ruelles se vidaient, car c’était le début de Bagatelle à Radio-Canada. Parfois ma mère nous accueillait avec un bon chocolat chaud. Assis sur le tapis du salon, mes cartes de hockey préférées à côté de moi, mon petit frère qui a 3 ans et notre chat Magoo entre nous deux qui ronronnait de bonheur. J’aurais pu m’endormir facilement, mais ce n’était pas le temps.

Emmitouflé dans mes certitudes, je frotte mes pieds sur le tapis du salon. La bombe nucléaire pourrait tomber au milieu de Lachute que ça ne dérangerait pas mon bonheur présent.

Pour souper, c’est un très ordinaire spaghetti trempé dans du jus de tomate! Ce n’est pas de la gastronomie, mais c’est fait avec le cœur d’une maman. Mon frère prend son bain bouillant et une fois qu’il a fini je vais aller  tremper dans la même eau, ça ne me dérange pas, c’est mon frère. Je suis prêt pour la soirée, j’ai mon pyjama de hockey sur le dos celui de la ligue nationale en flanelle, mes pantoufles en phentex et mes cheveux mouillés par en arrière comme Ron Fournier.

Mes cartes de hockey sont à côté de moi,  souvent les cartes des deux équipes qui vont jouer samedi soir. Ma table de hockey n’est pas loin non plus. La partie de hockey peut commencer, mais il n’est que 18h.

Le logis est embaumé par l’odeur des beignes aux patates de ma mère. Le petit logis de la rue Filion est un immense beigne aux patates. Ça sentait tellement bon que j’avais l’impression que le Bon Dieu lui-même pendant son chiffre venait prendre sa pause dans la cuisine de Mado.

Ma mère dansait, faisait ses beignes pendant que mon père n’était pas  là. Mon père est un fantôme en quelque sorte. Ma mère dansait malgré l’aide sociale, malgré mon père, malgré la vie.

À 19h c’était Le monde merveilleux de Disney, merveilleux seulement quand on nous présentait des dessins animés sinon leurs films étaient mauditement plates.

20h. Les rues et ruelles du comté d’Argenteuil sont vides. Il y a de la lumière dans tous les salons de la région. Lionel Duval présente le hockey dans son bel habit bleu poudre et par la suite donne son micro à René Lecavalier et Richard Garneau. Le Canadien a perdu ou gagné, mais une chose est sûr Chris Nilan s’est battu. J’ai bu une liqueur Fiesta en bouteille et mangé des beignes aux patates.

Les beignes de Mado étaient aussi bons que ceux du vieux monsieur du marché aux puces. Le bonheur prend toutes sortes de formes et parfois même il se transforme en beignes aux patates.